Une région franco!
Il y a trois ou quatre générations, des francophones ont quitté la Beauce, la Gaspésie, Bellechasse, le Nouveau-Brunswick et le Lac-St-Jean en train, avec leur bagage et leur bétail, laissant des familles qui leur étaient chères à Sully, à Pokemouche, à Taschereau, à La Doré ou à Fort Coulonge.
Ils sont débarqués à Cochrane pour cultiver, à Smooth Rock Falls pour travailler pour la papetière, à Kapuskasing et Hearst pour défricher les terres, à Dubreuilville pour construire un gros moulin. Un peu comme on a fait partout, au Québec, dans les années 1920 et 1930 et dans les années 1950.
Ces gens ont pris racine dans la région, avec leur accent bien de chez eux et leurs recettes de pâté à la viande, de tourtière et de cipâte. Ils ne sont pas seuls à avoir rêvé à un avenir meilleur dans une région où le sol est riche et les arbres abondent. Des migrants en provenance d’une Europe tourmentée y ont aussi trouvé refuge, entre deux guerres. Les Finlandais, les Polonais, les Ukrainiens sont aussi venus couper le bois, nourrir la terre.
Ensemble, ils ont construit une nouvelle région. En défrichant la forêt, l’endroit est devenu un magnifique terrain de jeu.
Aujourd’hui tout ce beau monde parle français, franglais et anglais. Ça donne droit à toutes sortes de belles tournures. Par exemple, ici, on ne va pas dans un bar, on va « à la bar » – sauf qu’on dit « à’ bar ». On ne va pas à Cuba, on va au Cuba. On ne fait pas du quad, on fait du quatre roues. On joue dans la poudreuse, mais on fait plus de boondocking. On s’est construit une langue qui s’apparente au chiac de l’Acadie.
En 2011, on est plus de 45 000 à parler français dans le district (ou la région administrative) de Cochrane – qu’on prononce Kââ-creune, pas Co’craine. D’est en ouest, les populations sont de plus en plus francophones, passant de 56 % à Cochrane à 96 % à Dubreuilville.
On a beau être en Ontario, on n’est pas si différents. Y a que l’accent !