« Rider » en Ontario
Une expérience sur les sentiers du Nord de l’Ontario
L’Ontario, c’est pour « rider » à motoneige comme on dit ici. C’est pour les dévoreurs de kilomètres et pour ceux qui aiment rouler hors des sentiers battus sur un territoire accessible qui ne semble pas avoir de limite.
Peu de Québécois sur ce territoire. Les « riders », ce sont généralement les amateurs du Toronto métropolitain qui ne trouvent pas de neige chez eux ou les habitués Américains du Michigan et des états de la région des Grands Lacs qui accèdent à la porte d’entrée du circuit par la ville frontalière de Sault-Sainte-Marie. C’est là où je me suis rendu pour prendre le départ du Corridor du Nord avec deux compagnons de route Franco-Ontariens : Patrice Dubreuil et son père Raymond.
En français
La grande différence que certains motoneigistes québécois craignent semble tenir à la langue. Et ils peuvent être rassurés en bonne partie à ce sujet puisque le Nord de l’Ontario abrite une population largement francophone avec ses institutions, ses commerces, ses médias et sa culture. Dans la majorité des villes le long du Corridor du Nord (Timmins, Cochrane, Smooth Rock Falls, Kapuskasing, Hearst, Wawa, Dubreuilville et autres), le français s’affiche ouvertement et ils pourront être accueillis et servis en français en plus de rencontrer plusieurs francophones de souche qui ont souvent des liens familiaux étroits avec le Québec d’où provient leur famille.
Pas de dépaysement mais des différences
Le Nord-Ontario ne constitue pas un dépaysement total pour les motoneigistes québécois mais il y a quand même des différences notoires quant au paysage. Pas de grosses montagnes à cette hauteur du Bouclier canadien mais plusieurs dénivellations et des falaises qui dénotent une ascension en altitude. Nous nous trouvons à suivre le versant est du lac Supérieur et l’épaisseur de neige au sol augmente progressivement à mesure de notre montée vers le nord, une région toujours favorisée par un couvert enneigé appréciable.
Un territoire ouvert
On comprend vite que tout ce territoire a été entièrement buché lorsqu’on constate que le couvert forestier est essentiellement constitué de repousses de bouleau et de peuplier faux-tremble. On traverse aussi plusieurs jeunes plantations de conifères et on rencontre parfois quelques pins géants oubliés aux abords des pistes. Le paysage est agrémenté de grands lacs et de superbes rivières qui, au lieu de couler vers le sud, comme chez nous, coulent franc nord vers la baie James.
La première matière à surprise visuelle, d’un point de vue québécois, a trait à l’immensité du territoire, aux distances impressionnantes entre les communautés et au fait qu’on puisse franchir des centaines de kilomètres sans même traverser de route. La présence des grands pylônes reste le seul rappel de la « civilisation » puisque le sentier suit souvent leur corridor, mais on roule aussi beaucoup sur d’anciens chemins forestiers plutôt que sur des emprises ferroviaires comme au Nord et à bien d’autres endroits au Québec.
Questions de sécurité
L’Ontario possède un vaste réseau de sentiers de motoneige tout à fait comparable à celui du Québec en termes de nombre de kilomètres fédérés, en termes de qualité de sentier ainsi que de structure organisationnelle avec des clubs qui regroupent une véritable armée de bénévoles. Le tourisme à motoneige, comme on le connaît au Québec, reste à développer. Ce qu’on observe ici, c’est surtout une pratique plus sportive et une grande majorité d’hommes avec des machines performantes.
Parlons franchement, bien des motoneigistes viennent ici pour s’éclater. Sans être le Far West de la motoneige, les sentiers ontariens ne font presque pas l’objet de surveillance bien que fédérés et réglementés. D’autre part, tout l’espace se trouvant en terres publiques, le hors-piste se pratique sans contrainte, comme au nord des Monts-Valin. Le projet MooseBack Trails (mooseback.ca) répertorie d’ailleurs plusieurs circuits en plus de proposer une loupe de 1400 km qui fait partie du réseau que j’ai parcouru.
Toutefois, avouons-le, même si la limite de vitesse affichée est de 50 km/h, personne ne la respecte. À vrai dire, elle est irréaliste mais on suppose que des obligations légales l’imposent. Si vous avez l’intention de rouler à la vitesse maximum permise, dotez-vous d’un gyrophare pour vous faire voir de loin et ne pas vous faire emboutir.
Le parcours, et particulièrement le Corridor du Nord, demeure cependant des plus sécuritaire à cause de la largeur de la piste, de son dégagement et de la qualité de son entretien. Pour notre propre sécurité, on doit porter une attention soutenue aux courbes et bien les prendre à l’extérieur en ralentissant. On doit également coller à droite sur les buttes à l’aveugle où ne voit pas venir.
Aussi, pendant que nous y sommes, l’affichage reste discret sur les sentiers ontariens. Les stops des traverses sont bien présents. Les panneaux de destination et de distance sont placés aux endroits stratégiques. Pour le reste, on ne distingue qu’un panneau universel avec l’inscription « SLOW ». Il annonce les courbes, les buttes et la totalité des imprévus qui peuvent se dresser devant vous. Ralentissez donc d’abord et vous vous poserez des questions ensuite !